Une entreprise de valorisation durable des déchets offre une solution peu coûteuse en remplacement de l’incinération ou de l’enfouissement pour fabriquer à partir de résidus industriels toutes sortes de produits, du papier aux plastiques et aux biocarburants.

La grande idée de Lixea a germé à petite échelle, au fond d’un tube à essai ; c’était à Londres, il y a de cela cinq ans environ. Dans le courant de cette année, elle va se déployer à plus grande échelle au sein d’une usine pilote située dans l’ouest de la Suède.

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Krisztina Kovacs-Schreiner, Chief Executive - Lixea

Les objectifs de l’entreprise ne s’arrêtent pourtant pas là. Dans l’Union européenne et aux États-Unis, pour ne parler que de ces zones géographiques, quelque 100 millions de tonnes de déchets de bois – provenant notamment des usines de papier, de la sylviculture et de la filière de la construction – échappent au recyclage chaque année. Les fondateurs de l’entreprise – chimistes et ingénieurs chimistes – ont mis au point un procédé permettant de décomposer ce bois en éléments de base, tout en extrayant les métaux lourds nocifs que génère souvent la transformation du bois.

« Nous allons offrir une seconde vie aux déchets ligneux », déclare Krisztina Kovacs-Schreiner, directrice générale de Lixea. « Notre technologie repose sur une nouvelle solution à base de solvants. En résumé, nous dissolvons les déchets de bois dont nous séparons les composants, pour en faire quelque chose de nouveau. »

Le « procédé reposant sur les dendrons » de Lixea a été élaboré par Florence Gschwend, cofondatrice de l’entreprise, dans le cadre de son doctorat à l’Imperial College de Londres. Ce procédé utilise des liquides ioniques pour isoler différents éléments : la cellulose, qui peut servir à fabriquer toutes sortes de produits, du papier aux vêtements en passant par les plastiques ; la lignine, qui peut être utilisée dans d’autres types d’applications industrielles, y compris les biocarburants ; et les métaux lourds présents dans les déchets de construction, qui peuvent également être réemployés. Tout ce qui contient de la cellulose et de la lignine peut être transformé grâce à ce procédé.

Objectif Durabilité

« Le grand avantage de notre procédé, c’est qu’il permet de décomposer n’importe quel type de matériau organique à base de biomasse, y compris les résidus de cultures », explique Krisztina. « Et pour la plupart des filières, ces déchets-là sont embarrassants, on les brûle ou ils finissent à la décharge. »

Lixea a été primée lors de l’édition 2019 du concours de l’innovation sociale, organisé par l’Institut BEI pour promouvoir l’entrepreneuriat environnemental et social créatif. L’entreprise a remporté plusieurs autres prix prestigieux et attiré des investissements, dont 2 millions d’euros octroyés par le Fonds du Conseil européen de l’innovation ; elle a aussi reçu des fonds au titre du programme Horizon 2020 de l’Union européenne pour la recherche et l’innovation.

« Il y a cinq ans, notre entreprise reposait sur une personne et une idée, et maintenant nous sommes 10 et disposons de plus de 4 millions d’euros en banque », se réjouit Krisztina, qui a rejoint la société en mars 2020 après avoir travaillé plus de 10 ans dans la bioéconomie. À ses yeux, travailler avec l’équipe de Lixea est l’occasion de contribuer concrètement à instaurer un monde plus durable.

« Je ne voudrais pas qualifier mon travail de vocation, mais il me passionne vraiment tous les jours. »

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Lixea déploie actuellement une usine pilote à Backhämmar, en Suède. L’entreprise a choisi ce pays en raison de l’importance de sa filière bois – l’usine utilisera la sciure de bois issue de scieries voisines pour alimenter son procédé de conversion.

« Un minuscule tube à essai peut donner des résultats vraiment prometteurs ; mais le véritable test, en ce qui concerne la technologie, c’est lorsque vous la déployez à plus grande échelle. C’est une question de développement des procédés », affirme Krisztina.

Circularité

Lixea s’emploie à rendre son procédé aussi durable que possible. Les liquides ioniques utilisés pour décomposer le bois et d’autres matériaux ligneux peuvent être recyclés plusieurs fois. « Il s’agit d’un système en boucle fermée », poursuit-elle, « par conséquent, rien ne s’échappe réellement du procédé, à part un peu d’eau résiduelle ».

L’entreprise souhaite exploiter l’usine pendant au moins un an avant de passer à un déploiement à plus grande échelle. À terme, Lixea envisage cependant d’accorder des licences sur son procédé à des industries locales qui pourraient ensuite traiter leurs propres déchets sur place.

« J’aimerais que de nombreuses entreprises voient le jour et traitent effectivement leurs déchets de bois sur site », conclut-elle. « Nous voulons élaborer des solutions locales, adaptées au contexte de la région concernée. Donc, s’il s’agit de l’Asie, on utilisera de la paille de riz. S’il s’agit du Royaume-Uni, de la paille de blé. En Californie, des déchets issus de vergers ou des déchets ligneux. Notre rêve serait d’apporter des solutions aux problèmes locaux. »